On s’est bidonné durant plus de deux heures, en ce mardi soir de première de la pièce La Cage aux folles, à l’Espace St-Denis. La relation tumultueuse du mythique couple d’homosexuels incarné au cinéma par Michel Serrault et Ugo Tognazzi renaît à travers la grande complicité d’Alex Perron et Marcel Leboeuf. Plus encore, cet univers de travestis de Saint-Tropez est transposé à Montréal, où ces oiseaux de nuit s’inspirent de Michèle Richard, Serge Laprade et même Denise Bombardier. Malgré quelques irritants, ce spectacle mis en scène par Joël Legendre est désopilant !
Plus de 50 ans après la création de cette pièce de Jean Poiret, La Cage aux folles nous entraîne dans le Village gai de Montréal, en 1978. Georges (Marcel Leboeuf) et son amoureux, Albin (Alex Perron) habitent au-dessus de leur cabaret, où ils présentent des spectacles de travestis.
Leur vie est chamboulée par la visite de Laurent, fils de Georges, qui veut se marier avec la fille d’un politicien très conservateur. Le jeune homme a décidé de présenter son père à sa future belle-famille, ce qui entraînera un choc culturel aux multiples rebondissements comiques !
Alex Perron est hilarant en drag queen vieillissante ! Dès le début de la soirée, il donne le ton de son personnage, en prenant un air dramatique dans un numéro de lip sync sur la chanson Je survivrai de Michèle Richard, traduction d’I Will Survive de Gloria Gaynor. À s’en taper sur les cuisses !
À ses côtés, Marcel Leboeuf est convaincant en souffre-douleur de sa douce moitié. Il est aussi un tenancier de bar coloré ! Entre autres, il chasse un journaliste trop insistant avec des mots bien de chez-nous : «Donne-moi ton Kodak, mon tabarnak !» Le moins qu’on puisse dire, c’est que cette adaptation de Joël Legendre et Sylvain Larocque ne fait pas toujours dans la dentelle!
Ce vaudeville atteint son paroxysme au moment du souper offert à la belle-famille de Laurent. Entre autres, la mère de la future mariée demande pourquoi on ne voit que des garçons grecs dans les assiettes. Embarrassé, Georges avance des réponses qui sont loin de convaincre son interlocutrice ! Le rythme de cette scène est étincelant !
Parmi les autres temps forts du spectacle, on remarque les apparitions électrisantes de Timothée Galais-Bayonne, en serviteur maniéré et fier de ses origines soreloises. Cet artiste français et congolais, finissant de l’École Supérieure de Théâtre de Montréal en 2024, est un nom à retenir.
Par contre, on peut s’interroger sur la direction d’acteur dans ce spectacle. Alex Perron, entre autres, parle tellement fort qu’on peine parfois à saisir certains mots. En plus, il semble avoir eu un problème de micro en ce soir de première.
Il y a aussi un anachronisme qui nous a fait sourciller, alors que les personnages pailletés et juchés sur leurs talons nous offrent une sorte de défilé de mode, au son de Vogue de Madonna. Or, nous sommes en 1978 et ce tube n’est sorti qu’en 1990 !
Au bout du compte, on constate que Legendre a surtout mis l’accent sur le côté ridicule de l’histoire d’Albin et Georges, alors que La Cage aux folles est aussi une réflexion sur l’affirmation de la différence, même lorsqu’elle est décriée. En un mot, c’est loin d’être sûr que cette nouvelle mouture aidera à faire évoluer les mentalités.
Malgré tout, la production montréalaise aura fait rire le public à gorge déployée, durant deux parties de 50 minutes chacune. Plus encore, des drag queens maintiennent une ambiance de cabaret, quelques minutes avant le spectacle et durant l’entracte. Michel Dorion, Rainbow, Tracy Trash et Nana ont ravi les spectateurs, en reprenant des airs de Diane Dufresne, Dalida, Abba, etc.
Bref, une fois démarré, ce feu roulant ne s’arrête plus !
La Cage aux folles
De Jean Poiret, mise en scène de Joël Legendre / Adaptation : Joël Legendre et Sylvain Larocque
Avec entre autres: Alex Perron et Marcel Lebœuf
Au Studio-Cabaret de l’Espace St-Denis, jusqu’au 16 novembre. Le spectacle devrait faire une tournée provinciale qui sera annoncée plus tard.
*Photos fournies par Tandem.mu
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