D’entrée de jeu, on est ravi par l’excellence des chanteurs et comédiens réunis pour la comédie musicale Le Matou. Matthieu Lévesque (Florent), Audrey Louise Beauséjour (Élise) se distinguent dans cette distribution où le jeune Eliot Dupras, 9 ans, s’avère une véritable révélation en Monsieur Émile. L’histoire du roman d’Yves Beauchemin, portée à l’écran en 1985, est maintenant mise en musique et c’est là le point faible de ce spectacle qui vaut néanmoins le détour.
C’était avant la DPJ
Le Matou nous ramène en 1974, alors qu’un couple de jeunes Montréalais, Élise et Florent, rêvent de se tailler une place en devenant propriétaire d’un restaurant, plus précisément La Binerie, sur le Plateau Mont-Royal. Egon Ratablavasky (Normand Carrière) surgit dans leur vie en prétendant les aider à atteindre leur objectif mais, le couple ne tardera pas à réaliser qu’il a été piégé et qu’il a tout perdu.
Malgré leurs déboires, les tourtereaux prennent en affection un petit garçon de leur voisinage, souvent laissé à lui-même, par sa mère monoparentale, bambocheuse et prostituée à ses heures. Marilou Morin endosse ce rôle coloré et ingrat avec aplomb. Parfois brutale envers son fils qui s’exprime déjà en multipliant les jurons, son personnage met en lumière les mauvais traitements infligés aux enfants.
Ce volet du spectacle m’a particulièrement interpellé, en cette période où l’on assiste avec stupéfaction au dévoilement de scandales qui frappent la DPJ (Direction de la protection de la jeunesse). La fin dramatique de Monsieur Émile s’avère d’ailleurs un moment percutant et bouleversant de cette comédie musicale!
Cela dit, dès le début de la représentation, Matthieu Lévesque nous démontre avec éloquence ses qualités d’interprète, en chantant sa désillusion, face à son rêve brisé. Son cri du cœur rappelle celui du célèbre d’Ovide Plouffe, personnage emblématique de Roger Lemelin, qui souffre de ne pas trouver sa place dans le monde.
En plus des comédiens déjà cités, ajoutons que Martin Larocque est irrésistible dans le rôle d’un Français au langage soigné qui contraste avec le vocabulaire joual qui l’entoure.
Un spectacle dynamique
Bien sûr, on se réjouit d’assister à une comédie musicale 100 % québécoise! Par contre, dans l’ensemble, les chansons de Jessy Brouillard ne réussissent pas à s’imposer. Qui, dans l’assistance, pourrait fredonner une seule des mélodies entendues durant cette comédie musicale de près de deux heures?
Il faut aussi dire que l’enregistrement sans relief de la musique qui accompagne les chanteurs n’aide pas! Certaines répliquent empiètent parfois sur les séquences préenregistrées. Bref, Le Matou a souvent bien de la difficulté à retomber sur ses pattes, avec cette bande sonore plutôt terne.
Cela dit, le spectacle est dynamique, grâce à la mise en scène ingénieuse de Joël Legendre et aux agréables chorégraphies de Maud Saint-Germain. Quant aux beaux décors de Nicolas Ricard, ils se déplacent facilement, de sorte qu’on est parfois entraînés sur le Plateau Mont-Royal, tantôt dans l’ambiance énigmatique d’une chambre d’hôtel, etc.
En résumé, Le Matou n’est pas un spectacle désagréable mais, il souffre de musiques qui le privent d’éclat, malgré les remarquables qualité de ses interprètes.
La comédie musicale Le Matou est présentée jusqu’au 10 novembre à la salle Pierre-Mercure de Montréal, puis du 19 novembre au 30 décembre à la salle Louis-Fréchette de Québec. Une tournée suivra en 2025. https://lematou.ca/dates-de-spectacle/
Le Matou
Comédie musicale adaptée du roman Le Matou d’Yves Beauchemin
Livret, paroles et musique : Jessy Brouillard
Mise en scène : Joël Legendre
Distribution : Matthieu Lévesque, Audrey-Louise Beauséjour, Eliot Dupras et Diego Flint (en alternance), Marilou Morin, Martin Larocque, Alain Dumas, Normand Carrière, Luis Oliva, Amélie B. Simard, Alexandre Bacon, Nicolas Drolet, Renee Wilkin et Lisa Palmieri
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