C’est un événement en soi: Nasanjargal Ganbold et Johanni Curtet, maîtres du chant diphonique de Mongolie, présenteront un concert, le 24 avril, à Montréal.
Ces deux chanteurs et musiciens proposent aux mélomanes de plonger «dans l’univers envoûtant des steppes de Mongolie, où la musique traditionnelle est un prolongement de la nature et du mode de vie nomade. Véritable écologie sonore, cette tradition vocale ancestrale, appelée khöömii (chant de gorge mongol)», est d’ailleurs inscrite au patrimoine culturel immatériel de l’humanité par l’UNESCO.
Nasanjargal Ganbold

Également connu sous le nom de Nasaa, ce chanteur originaire de l’Altaï, en Mongolie occidentale, est un multi-instrumentiste accompli (vièle à tête de cheval morin khuur, luth tovshuur, hautbois bishguur, guimbarde).
Ganbold a cofondé plusieurs ensembles, dont Hosoo-Transmongolia en 2005 et Sedaa en 2009, ce dernier fusionnant musiques mongoles et iraniennes.
En 2023, il a participé à la création du quatuor Tengerton, poursuivant ainsi son engagement pour la préservation et la diffusion de la culture musicale mongole à travers le monde.
Entretien avec Johanni Curtet

Ethnomusicologue, musicien et pédagogue français, Curtet est aussi un spécialiste du chant diphonique mongol. Après une formation en guitare classique au Conservatoire de Rennes, il a d’abord été initié à la pratique du khöömii Trân Quang Hai, en France. Il a ensuite perfectionné cet art vocal, notamment, à l’Université des arts et de la culture d’Oulan-Bator, en Mongolie.
«En fait, mon intérêt pour le khöömii a commencé dès l’adolescence», explique avec une pointe d’humour, le musicien français né en 1981. «J’avais envie de chanter les succès des groupes de ma jeunesse mais, je chantais faux! Tout le monde me disait d’arrêter! Et puis, j’ai vu un chercheur du musée de l’Homme en train de présenter cette technique vocale à la télé. J’ai tout de suite été fasciné!»
Le chant diphonique de la musique mongole est basé sur un son fondamental: le bourdon. «Les innombrables techniques de khöömii mongol sont regroupées en deux styles principaux. Dans le “kharkhiraa” le chanteur produit un raclement de gorge qui provoque la vibration des bandes ventriculaires ou fausses cordes vocales, et crée un second bourdon une octave inférieure. Dans l’“isgeree” khöömii, ce sont les harmoniques supérieures de la fondamentale qui sont mises en valeur, ce qui produit un sifflement aigu. Dans les deux cas, le bourdon est produit avec des cordes vocales très tendues, tandis que la mélodie est créée en modulant la taille et la forme de la cavité buccale, en ouvrant et fermant les lèvres et en bougeant la langue.»
Le khöömii est lié initialement à la vie quotidienne des nomades. Il est une imitation de sons de la nature, que ce soit «le souffle du vent, les chants d’oiseaux ou l’écoulement de l’eau», précise Johanni Curtet. «D’ailleurs, les Mongols ne considèrent pas le khöömii comme du chant. C’est plutôt une expression de leur relation avec la nature.»
Alors que la population de la Mongolie est d’environ 3 millions et demi d’habitants, il y a entre 500 et 600 personnes qui pratiquent cette technique vocale, souligne l’artiste engagé. Curtet a d’ailleurs joué un rôle déterminant dans l’inscription du chant diphonique mongol au patrimoine culturel immatériel de l’humanité par l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture, en 2010.
Compositeur de musique à l’image, il a signé la bande sonore du film If Only I Could Hibernate, premier film mongol à figurer en sélection officielle du Festival de Cannes.
Curtet a aussi fondé, en 2006, l’organisme Routes nomades qui promeut les arts et la culture mongols en Occident, à travers des concerts, expositions, conférences, etc.
Nasanjargal Ganbold & Johanni Curtet
Chants diphoniques de Mongolie
Ensemble, Nasanjargal Ganbold et Johanni Curtet offriront un concert mêlant chants, instruments, poèmes et improvisations, pour transporter le public au cœur de la culture mongole.
Jeudi 24 avril 2025, 20 h
Église Saint-Enfants-Jésus
5039, rue Saint-Dominique, Montréal
www.centredesmusiciensdumonde.com
Le séjour du duo Gambold-Curtet au Canada est une initiative de Traquen’Art (diffuseur des arts de la scène), en partenariat avec Routes Nomades de Rennes, en France, ainsi que le Centre des musiciens du monde de Montréal, le Small World Music Centre de Toronto et les ensembles Oktoecho de Montréal et E27 musiques nouvelles de Québec.
*Photos fournies par Traquen’Art.
Laisser un commentaire