«Nuit»: Jean-Pierre Perreault revient hanter la Place des Arts

Plus de 40 ans après la création de son célèbre spectacle, «Joe», le regretté chorégraphe montréalais, Jean-Pierre Perreault, se rappelle à notre bon souvenir, cette semaine. Laurence Lemieux qui a elle-même dansé sous la direction de ce maître, mène aujourd’hui sa propre barque et elle vient nous présenter Nuit, une autre oeuvre phare de Perreault.

«Un langage chorégraphique simple»

Laurence Lemieux a dansé dans une reprise de Nuit, juste avant le décès de Jean-Pierre Perreault qui a été emporté par un cancer, en 2002, à l’âge de 55 ans.

«Depuis tout ce temps, je considère que Nuit est très représentative du travail de Jean-Pierre. Ça a bien vieilli! La simplicité du langage chorégraphique est toujours pertinente!»

-Mais, qu’est-ce que raconte Nuit?

Dans la pénombre, les personnages martèlent le sol, explique Madame Lemieux. Différentes tensions s’installent. «Ils dansent la fragilité, la confrontation, la solitude. On découvre un groupe d’individus puis, on observe, par exemple, que l’un d’eux se détache de la masse. C’est qu’il a quelque chose à dire, ou plutôt à danser, face aux aléas du quotidien.»

Du même souffle, la chorégraphe précise qu’à l’origine, en 1986, Nuit avait été conçue, pour huit interprètes, soit, quatre hommes et quatre femmes.

«Puis, en 1988, Jean-Pierre avait décidé d’ajouter un interprète masculin et c’est finalement cette version que nous reprenons, car un de nos danseurs s’est blessé dernièrement et il a fallu alléger sa participation, en ayant recours à un neuvième danseur. Toute la dynamique du spectacle est très enrichie par cette distribution qui n’est plus soumise à la logique des nombres pairs.»

«Recréée dans sa forme d’origine»

Laurence Lemieux a voulu que Nuit soit «recréée dans sa forme d’origine». Cependant, près d’un quart de siècle après la disparition du chorégraphe, on a constaté que la majeure partie des décors de ce spectacle était introuvable.

«On a tout reconstruit la scénographie», explique celle qui dirige aujourd’hui sa propre organisation, la Compagnie de la Citadelle, qui a pignon sur rue à Toronto. «C’est un lieu modeste mais, en même temps, c’est un formidable espace de création! C’est clair que Jean-Pierre a été une source d’inspiration pour moi, à ce niveau également!»

Rappelons que la Fondation Jean-Pierre Perreault avait finalement réussi à installer ses studios en permanence, dans une ancienne église, à l’angle de Sherbrooke et de l’avenue De Lorimier. Mais, le chorégraphe n’a vu ce rêve se réaliser qu’un an avant sa mort.

Habituée à la persévérance, Laurence Lemieux n’allait pas laisser tomber son projet, pour une question de scénographie! «J’ai ramassé l’argent et fait refaire le décor dans les ateliers du Ballet national du Canada. Quant aux costumes, ce sont sensiblement les mêmes.»

Un devoir de mémoire

L’une des particularités de Nuit, c’est qu’il n’y a pas de musique. «En fait, on n’en n’a pas besoin», estime la chorégraphe. «Jean-Pierre a composé des rythmes à partir des respirations des danseurs et de leurs voix. On entend aussi le poids des corps, à travers leurs pas. Tout cela nous révèle l’intimité des interprètes, bien mieux que ne le ferait une trame sonore!»

Cela dit, cette danseuse de formation, née à Québec en 1964, a-t-elle été tentée de se joindre à la nouvelle distribution de Nuit? Après une brève hésitation, elle explique qu’«en vieillissant, il y a des choses qu’on fait ou pas. J’ai préféré me concentrer sur la reconstitution de l’oeuvre», ce qui n’est pas une mince affaire, précise-t-elle, en rappelant que Perreault voyait à toutes les facettes du spectacle, c’est à dire: scénographier, chorégraphier, éclairer et sonoriser lui-même ses créations.

Admirative devant le legs de ce pilier de la danse, au Québec, Laurence Lemieux conclut: «c’est important de recélébrer le travail de Jean-Pierre! Nuit va permettre au public de découvrir une oeuvre incontournable de la danse contemporaine et de réaliser que ce grand créateur a influencé d’autres chorégraphes.»

Après avoir été présentée à Toronto en 2023 et au Grand Théâtre de Québec, la semaine dernière, cette nouvelle mouture de Nuit fait escale au Théâtre Maisonneuve de la Place des Arts, pour quatre représentations.

Nuit

Chorégraphie de Jean-Pierre Perreault

Interprétée par les danseurs de la Compagnie de la Citadelle, sous la direction artistique de Laurence Lemieux.

Au Théâtre Maisonneuve de la Place des Arts, du 19 au 22 mars, à 20h.

Interprètes: Morgyn Aronyk-Schell, Valerie Calam, Tyler Gledhill, Sully Malaeb Proulx, Connor Mitton, Natasha Poon Woo, Heidi Strauss, Brodie Stevenson, Jarrett Siddall.

Photos fournies par Danse Danse.

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