Orchestre Métropolitain: un concert d’ouverture grandiose et bouleversant!

Yannick Nézet-Séguin et l’Orchestre Métropolitain ont transformé la Maison symphonique en cathédrale, pour leur grandiose concert d’ouverture de la saison 2024-2025, en interprétant la Symphonie n° 9 de Bruckner, suivie du Te Deum de cet illustre compositeur autrichien. Le Choeur Métropolitain nous a aussi fait frissonner durant la puissante pièce du compositeur autochtone Andrew Balfour. Toutes les oeuvres au programme ont été jouées sans interruption, dans cet extraordinaire voyage musical et spirituel !

L’OM et le Choeur Métropolitain, 22 septembre 2024 / Crédit: François Goupil

Parmi les grands atouts de l’OM, on ne le dira jamais assez, il y a le brillant communicateur qu’est Yannick Nézet-Séguin. En quelques mots et avec simplicité, cette star de l’univers classique trouve toujours le ton pour toucher le public et l’amener à s’élever à travers la musique.

Paradoxe

C’est avec son prodigieux doigté que le maestro nous a présenté Mamachiwochin (L’art de chanter des louanges) du compositeur d’origine crie Andrew Balfour. Le chef d’orchestre montréalais a délicatement évoqué les relations «ambigües» qu’entretiennent des personnes issues des Premières nations avec la religion catholique. Alors que le clergé a dirigé des pensionnats où l’on tentait d’éliminer la culture autochtone, le catholicisme est encore aujourd’hui adopté et pratiqué par plusieurs, expliqua-t-il. 

C’est ce paradoxe que Balfour a voulu mettre en lumière dans sa captivante partition, où la spiritualité autochtone rencontre la culture catholique. 

Dès le début de la pièce, les choristes murmurent des mots de façon aléatoire, évoquant une communauté qui prie, dans un climat imprégné d’incertitude. Puis, le chœur, préparé par François A. Ouimet et Pierre Tourville, chante les louanges à Dieu du Psaume 67, traduit en langue crie.

«Les cordes représentent une fondation solide, un sol stable, la Terre Mère», précise le compositeur, dans le programme du concert, au sujet de cette magnifique pièce de six minutes. 

Après un deuxième segment murmuré, le choeur chante des paroles en anglais, « O Praise God », puis, vers la fin, les chuchotements reprennent et s’estompent jusqu’au silence. 

De ce bouillonnement d’émotions, on passe directement au monde de Bruckner, sans applaudissements, comme l’a demandé le maestro qui a conçu ce concert comme «une cérémonie religieuse qu’on se fait en musique».

La divine symphonie

La Symphonie n° 9 en ré mineur, est la dernière symphonie d’Anton Bruckner qui la concevait comme son oeuvre ultime, en la dédiant «Au bon Dieu, à condition que celui-ci accepte.» Entamée en 1887, cette symphonie demeure inachevée, puisque le compositeur, décédé en 1896, n’a pas réussi à écrire le quatrième et dernier mouvement.

Yannick Nézet-Séguin qui a enregistré l’intégrale des symphonies de Bruckner avec l’OM, guide ses musiciens avec une grande ferveur dans cette partition à laquelle on accole souvent l’expression «cathédrale sonore».

À la fois solennel et mystérieux, le premier mouvement s’ouvre sur une introduction lente et sombre qui s’agite peu à peu. Cette première partie de l’oeuvre qui, à elle seule, dure plus de 25 minutes, est éblouissante de contrastes et de changements de tempos, jusqu’à une marche indiquant la fatalité, accentuée par les cuivres et les percussions.

Puis, c’est le Scherzo qui prend la forme d’une danse infernale ! Certains spécialistes estiment que le caractère sauvage de ce morceau semble préfigurer Le Sacre du printemps de Stravinsky. Les musiciens de l’OM sont fascinants à observer, en particulier durant cette pièce spectaculaire avec pizzicati aux cordes et enchaînements harmoniques audacieux !

Quant à l’Adagio, il commence par une introduction dont les harmonies rappellent Parsifal de Wagner. Suivront, une marche lente, puis un choral, que Bruckner intitule « Abschied von Leben » (Adieu à la vie). L’oeuvre s’achève dans une ambiance d’apaisement et de contemplation. 

Conclusion triomphale !

À ce moment, l’émotion est à son comble et pourtant Nézet-Séguin nous entraîne dans une autre dimension avec le Te Deum de Bruckner. Cet hymne d’action de grâce, présenté pour la première en 1885, est écrit en cinq sections.

Après une ouverture grandiose où le chœur donne le ton de l’oeuvre, la deuxième partie est chantée comme une supplication par les solistes, dont la basse Ryan Speedo Green qui se distingue par l’intensité de son interprétation. L’épisode central du Te Deum évoque une fureur apocalyptique, avant que le calme ne revienne et que les solistes et le chœur implorent à tour de rôle: «Sauve ton peuple».

Finalement, après une odyssée musicale de 90 minutes sans entracte, baignant dans les questionnements métaphysiques d’un compositeur à la santé déclinante qui voyait la mort venir, voilà que ce concert se termine dans un esprit joyeux, avec la conclusion triomphale du Te Deum !

On pourra tergiverser longtemps sur le langage musical de cette oeuvre vocale sacrée qui ne serait pas à la hauteur de celui de la Symphonie n° 9. Il n’en reste pas moins que Bruckner lui-même avait recommandé de présenter son Te Deum en guise de mouvement final de sa symphonie inachevée.

Enfin, la présence du choeur dans l’oeuvre de Balfour, au début du concert, puis, après la célèbre symphonie, a fait de ce voyage musical un tout, où l’émotion n’a cessé de grandir et de se renouveler ! Magistral !

Au centre de la photo: les solistes du concert Figures légendaires / Crédit: François Goupil

Le concert d’ouverture de la saison 2024-2025 de l’Orchestre Métropolitain, intitulé Figures légendaires, était présenté à la Maison symphonique, le 22 septembre, avec le Choeur Métropolitain et les solistes: Ryan Speedo Green (basse), Limmie Pulliam (ténor), Latonia Moore (soprano), Jennifer Johnson Cano (mezzo-soprano), sous la direction de Yannick Nézet-Séguin.

Commentaires

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *